Arthur Conte, un Catalan fier de l’être
Arthur Conte se définit lui-même comme « fils de la Catalogne, de la vigne, de l’histoire « à l’indicatif présent », du rugby, et de la politique… ».
Journaliste, historien, écrivain, homme politique, ce Catalan de talent à l’accent rocailleux, est resté fidèle à sa région.
Dans cet article, évoquons ses nombreuses activités :
– l’homme
– l’homme politique
– le journaliste
– l’écrivain
L’homme
Des origines modestes
Arthur, Léon, Conte naît le 31 mars 1920 à Salses (Pyrénées-Orientales). Il est le fils de Pierre, Laurent, Paul, Conte et de Thérèse, Marie, Panazols.
Sa famille, d’origine modeste, est, comme beaucoup en ce temps-là, dans l’agriculture. Son arrière-grand-père, Jean Gibert, est berger.
Son père est un laïque de convictions socialistes ; sa mère est une catholique pratiquante. Arthur reçoit les sacrements catholiques ; il écrit dans son autobiographie :
« Je serai toujours un bon catholique…Il n’y aura à aucun moment raison de me suspecter d’athéisme ou de paganisme. »
Il aime écouter ses grands-parents et arrières-grands-parents lui parler de la vie au pays et son père lui raconter la guerre de 14-18 à laquelle il a participé.
Il écrit dans une chronique du Figaro en mars 1993 :
«La rugosité de la langue catalane, dans la bouche de mon père -un solide tout trapu, qui n’avait peur de rien, pour autant pas flambard pour un sou – rendait plus épique encore le courage et le martyre de ces millions d’hommes englués dans la boue des tranchées».DOMINIQUE BONA
Des études
Toute la famille ne parle que le catalan. Arthur apprend le français à l’école primaire. Il en garde l’accent et reste imprégné de la culture populaire catalane . Dès l’age de 8 ans il pratique le rugby à XV dans l’équipe de son village.
A partir de 1930, il suit des études secondaires au lycée François Arago de Perpignan (Pyrénées- Orientales).
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Il poursuit des études supérieures classiques à l’Université de Montpellier et obtient une licence de lettres en 1940.
La guerre
A l’issue de ses études supérieures, Arthur Conte est mobilisé ; à son retour en 1941, il est employé comme attaché à la préfecture de Carcassonne (Aude).
En janvier 1943, comme beaucoup d’hommes valides, il est envoyé en Allemagne dans le cadre du Service du Travail Obligatoire (STO). Son attitude frondeuse lui vaut d’être interné dans un camp de représailles. Il en revient fin avril 1945.
Un « beau » mariage
En 1951, Arthur Conte épouse, en grandes pompes à la cathédrale Saint Jean de Perpignan, Colette Lacassagne, fille d’Henri Lacassagne, transporteur et riche propriétaire du lieu.
Ils ont deux enfants :
– Dominique Bona, romancière, essayiste, prix Renaudot et Interallié, élue à l’Académie Française en 2003 ;
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– Pierre Conte, éditeur et ancien directeur du groupe Figaro.
Afin de ne pas exposer sa famille aux polémiques suscitées par sa vie politique locale, Arthur Conte choisit de résider à Paris.
Des racines fortes
Arthur Conte a un esprit curieux. Intelligent et brillant, il acquiert une grande érudition.
Simple, il est proche des gens, des plus humbles ; il est profondément enraciné dans sa région et dans sa famille.
Il n’en abandonne jamais ni la langue, ni l’accent ; attaché aux traditions, mais tourné vers l’avenir, il reste « un provincial à Paris » comme le titre qu’il donne à un de ses livres
Ce Catalan à l’accent rocailleux, passionné par la vie, se hisse , par sa seule intelligence au sommet de la réussite.
L’homme politique
Un engagement politique
A son retour d’Allemagne, après la guerre, il adhère à la SFIO (Section Française de l’Internationale Ouvrière, qui devient plus tard le Parti Socialiste); il en devient le secrétaire départemental dans les Pyrénées-Orientales.
Élu maire de Salses en 1947, il le reste jusqu’en 1972. Il crée l’association des maires des Pyrénées Orientales et en est le président de 1947 à 1972.
Il est élu Conseiller général de Latour-de-France (Pyrénées-Orientales) puis député en 1951.
En 1957, il est nommé Secrétaire d’État au Commerce et à l’Industrie dans le gouvernement de Maurice Bourgès-Monoury, dans les derniers mois de la Quatrième République.
De 1958 à 1962, il retrouve son siège de député et est vice-président de la commission des Affaires Étrangères de l’Assemblée Nationale en 1959.
En 1963, il démissionne de la SFIO dont il désapprouve la proximité avec le Parti Communiste qu’il estime « porte parole de l’URSS en pleine guerre froide ».
En 1964, il abandonne son poste de Conseiller général.
Réélu député en 1968 sous l’étiquette de Socialiste indépendant, il siège jusqu’en 1972 au sein du groupe parlementaire de l’UDR (Union des Démocrates pour la République) à laquelle il a adhéré.
Un Européen convaincu
De 1956 à 1962, il est délégué à l’Assemblée Consultative du Conseil de l’Europe.
De 1962 à 1963, il préside l’Assemblée de l’Union de l’Europe Occidentale .
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Partisan de Georges Pompidou dont il soutient activement l’élection à la présidentielle de 1969, il se prononce en faveur de l’élargissement de l’Europe des Six et plaide pour le oui au référendum du 23 avril 1972.
En 1981, proche de Valéry Giscard d’Estaing, il lui consacre un livre « L’Homme Giscard » en soutien à sa candidature à un deuxième mandat.
Le journaliste
Des débuts dans la presse locale
En 1947, il commence sa carrière de journaliste dans Le Cri du Soir, quotidien socialiste des Pyrénées-Orientales, puis dans L’Indépendant d’avril 1950 à fin 1951.
Une collaboration à la presse nationale
A Paris, il collabore à Paris Match, au Quotidien de Paris, au Figaro, à France Soir, à Jour de France, aux Nouvelles Littéraires.
Un réformateur à l’ORTF
Le 12 juillet 1972, un an avant la fin de son mandat, Georges Pompidou, à l’initiative de Jacques Chaban-Delmas, le nomme à la tête de l’ORTF (Office de Radiodiffusion-Télévision Française).
C’est à ce poste qu’Arthur Conte fait le plus parler de lui.
Dès sa prise de fonction, il se propose de réformer une télévision qui, depuis ses débuts, n’est qu’une « machine de propagande au service des politiques de tous bords ». Il estime que le meilleur service à rendre à la politique est de laisser la télévision vivre sa vie en toute liberté.
Les hommes politiques, lui reprochent de laisser se développer un esprit qu’ils jugent hostile au pouvoir.
Empêché de mener à bien les réformes dont il avait l’idée, il démissionne avec fracas en octobre 1973 suite à une polémique sur l’indépendance dont jouissait la télévision de l’époque. Prisonnier des syndicats maison et empêché par sa tutelle de mener à bien les réformes dont il avait l’idée, il prononce quelques jours avant son départ cette phrase restée célèbre :
« Je dois être libre pour être loyal. »
Il raconte cette expérience dans son livre « Hommes libres ».
Il est plus tard producteur pour FR3 de la série de télévision Histoires de France.
L’écrivain
Une œuvre
Écrivain très prolifique Arthur Conte a écrit de très nombreux ouvrages ayant trait à la politique, à l’histoire, à sa région natale.
La politique
Une partie de son œuvre est consacré à la politique et aux politiciens.
A l’occasion du bicentenaire de la Révolution, il publie « Le 1er janvier 1789 ». Il sera suivi de nombreux ouvrages consacrés aux premiers jours de l’année :1800, 1900, 1920, 1940, 1960 ou encore de 1980 et 1983.
Après «L’Homme Giscard » publié en 1981, il publie en 1985, une galerie de portraits « Les Présidents de la Vème République », en 1986 « Les Premiers Ministres de la Vème République » mais aussi « Les dictateurs du XXème siècle »(1984), « Karl Marx et son époque »(1983).
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L’histoire
Passionné d’histoire, il en fait l’objet :
– de nombreux ouvrages : « Yalta, ou le partage du Monde:11 février 1945 »(1965),« L’épopée coloniale de la France », « Verdun-24 octobre 1916 »(1987)….
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ou « Sire, ils ont voté la mort – la condamnation de Louis XVI »(1966), « Billaud-Varennes-le géant de la Révolution »(1989)
– de grandes fresques historiques : « L’épopée mondiale d’un siècle de 1865 à nos jours » (5 volumes-1970), « Nostalgies françaises »(1993), « Grandes françaises du XXème siècle »(1995),« L’épopée des Chemins de fer français »(1996), « Les paysans de France, de l’an 1000 à aujourd’hui »(2000), « Soldats de France de l’an 1000 à l’an 2000 »(2001),« Bâtisseurs de la France de l’an 1000 à l’an 2000 »(2004).
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Sa région
Arthur Conte se voit comme « Un provincial à Paris » tel qu’il l’écrit dans son autobiographie éponyme publiée en 1997; il est amoureux de son Roussillon natal ; il lui consacre des ouvrages comme « Au village de mon enfance »(1994), « Pyrénées Orientales »(1995), « Ma terre de toujours , histoire d’une province française »(2002).
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Il écrit la biographie de « Joffre » (1991), hommage d’un Catalan à un autre Catalan ainsi que « La légende de Pau Casals », un autre Catalan mais du Sud celui-la.
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Ce Catalan exceptionnel décède à Paris le 26 décembre 2013, à l’âge de 93 ans. Il est inhumé au cimetière Saint Martin de Perpignan car comme dit sa fille, Dominique Bona :
« Je sais qu’ici son image est celle de l’homme public, le village de Salses, la ville de Perpignan, le Roussillon de manière générale ont gardé cette grande place dans son cœur jusqu’à la fin. Il est mort à Paris, mais il est mort en Catalan, en parlant Catalan, en retournant par l’esprit à son enfance, à ce pays de la tramontane et du mont Canigou.Si moi, j’ai perdu mon accent au fil de mon histoire, mon père l’avait conservé et je crois que c’est ce message de fidélité que je conserve en moi-même, fidélité et loyauté envers les siens. »
J’espère que cet article, vous a plu .
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Jean-Pierre HUTTER
Ce nom me replonge dans mes jeunes jeunes années ! Je ne connaissais de lui que son nom (accolé à ORTF), et grâce à cet article je suis ébloui par l’oeuvre de ce personnage. Merci Anne-Marie
Jean-Louis Amiel
Belle biographie succincte d’un catalan dont la vie eut un certain panache !